dimanche 31 juillet 2016

samedi 30 juillet 2016

Si j'avais un char...

Tout Québécois qui se respecte connaît cette chanson de Stephen Faulkner. Si j'avais un char s'est inscrite dans notre psyché collective. Elle raconte l'histoire d'un pauvre type qui va plutôt prendre un taxi parce que, justement, il n'a pas de char.

J'ai grandi parmi des hommes d'un autre temps qui n'avaient pas de char. Ils s'occupaient de nourrir leurs enfants. Ils investissaient dans le garde-manger plutôt que sur un char. Mon père et la plupart de ses amis n'avaient pas de char.

Évidemment, je trouvais un peu poche de vivre au sein d'une famille qui n'avait pas de char. Surtout au cours de mon adolescence. Comment pourrais-je copuler sans disposer d'un char? Étais-je dès lors condamné à l'exclusion sociale?

-Pourquoi qu'on n'a pas d'char poupa? que je demandais à mon père.

-Y'en a qui ont des chars mais y'a rien à manger dans leu' frigidaire...

C'était sa seule et unique réponse.

Poupa allait travailler à pieds ou à vélo. Il prenait l'autobus. Ou bien quelqu'un lui donnait un lift.

Mes frères ont tous fini par avoir un char. Peut-être pour casser une forme de malédiction familiale dans un monde froid et mécanique.

Contrairement à eux, je n'aurai jamais appris à conduire et, franchement, je ne veux rien savoir à ce sujet. Même si ma blonde a un char. Même si c'est pratique pour se rendre au bout du monde. Même si c'est moins éreintant pour les épiceries.

Malgré tout ça, je ne suis toujours pas en amour avec les chars.

Je me suis fait lentement à l'idée de vivre sans char.

C'est vrai que mes yeux éprouvent quelques difficultés. Au-delà d'une certaine vitesse je peine à faire le focus. Les paysages défilent devant mes yeux comme sous l'effet d'un stroboscope. Donc, je ne suis pas fait pour avoir un volant entre les mains et, tout compte fait, c'est mieux ainsi.

Au lieu de polluer et d'engraisser dans l'inaction, je me déplace avec mes pieds. Du coup, je bénéficie d'un meilleur bilan de santé.

***

Je me souviens d'un gars qui me disait que je ne pourrais jamais me faire une petite amie sans un char. Ce gars-là, évidemment, avait un char. Un beau char à part de ça. Je ne saurais vous dire quelle marque puisque je m'intéresse fort peu aux chars...

Ce soir-là, ce gars-là, qui s'appelait Mike, m'a donné un lift pour aller fêter dans un bar. Il était accompagné de sa petite amie, une anglophone aux jambes longues. J'étais seul et me sentais trou du cul comme un gars qui n'a pas de char.

Arrivé au bar, la petite amie de Mike s'est laissée enjôler par un autre gars. Mike était en tabarnak.

-J'décrisse d'icitte! J'me su's faitte chier-là par c'te salope! m'a dit Mike.

Entre temps, j'avais fait la connaissance d'une fille qui se foutait que je n'aie pas de char. Mike a eu l'amabilité de nous raccompagner à bord de son char.

Quand je fus rendu à la destination, j'en profitai pour répondre à Mike qui s'inquiétait que je ne puisse pas séduire une fille sans avoir de char.

-Quand t'as pas d'char, Mike, ça t'prend juste un bon chum comme toé pour ramener une fille... Merci Mike.

Mike riait jaune. Et la suite de l'histoire, franchement, cela demeure dans le domaine de la vie privée.

***

Non, je n'ai pas de char. Ou, du moins, je n'en utilise pas.

J'ai appris à apprécier mes longues marches et mes non moins longues randonnées à vélo.

Je profite pleinement des paysages et des chants d'oiseaux. Mon coefficient de stress est moins élevé. Tout me semble plus facile, plus simple et plus beau.

Je suis condamné à bouger et j'en suis heureux.

Aucune saison ne m'effraie. Le beau temps comme le mauvais temps ne viennent pas à bout de ma joie de marcher.

Voilà, je n'ai pas de char.

Et je ne veux pas en conduire.

Jamais.

Merci beaucoup.

vendredi 29 juillet 2016

No Future

Qui croit vraiment en ce système sinon trois pelés et un tondu? Qui se battrait corps et âme pour ce semblant de démocratie lorsqu'elle s'écroulera? Probablement des mercenaires. Des décrocheurs scolaires. Des chômeurs. Des victimes du capitalisme sauvage recyclées en gardiens d'une loi qui les a pourtant méprisés. Ou bien des caves, comme moi... Des caves qui se diront qu'une communauté sans lois, même si elles sont mauvaises, sombre inévitablement dans une forme de cannibalisme.

Croyez-vous que les politiciens croient vraiment ce qu'ils disent? J'en doute. Ont-ils besoin de croire en leurs mensonges? Pas du tout.

Qui tient ce système en fonction? Vous, moi et tous les autres idiots qui ne connaissent rien de mieux et qui ont enfoui fort profondément leurs illusions comme leurs désillusions. Ils respirent de l'air vicié tous les jours et s'accommodent de l'odeur de putréfaction qui flotte sur nos institutions irrémédiablement corrompues.

Tout le monde est blasé. Tout le monde, riche ou pauvre, membre de l'élite ou pas. Plus personne ne croit en ce monde que l'on porte sur nos épaules comme un cadavre pourri, par habitude ou par compassion, parce qu'on ne laisse pas la viande pourrir sur le bord du chemin.

Il ne reste donc que des réflexes. Les réflexions se sont envolées. Tout est feint. Tout est calculé. Tout est vain. Le non-avenir d'une illusion. Le refus du futur qui sent bon et fait pousser des ailes.

La grande parade de l'avenir radieux est terminée.

Il n'y a plus de Grande Idée.

Il n'y a que du quotidien assaisonné de rêves insignifiants qui ne suscitent aucun enthousiasme.

Il n'y a que des rires jaunes.

Il n'y a que des inquiétudes sur ce que demain nous offrira.

Le pire est devant.

Le mieux, c'était il y a fort longtemps. L'Âge d'Or c'est quand les indigènes se promenaient d'un point d'eau à un autre pour écouter le chant des oiseaux. Maintenant, c'est l'Âge du Fer et du Plomb. On écrase tout. On liquide tout. On méprise tout.

Je n'écris pas ça pour vous déprimer.

Je l'écris simplement pour comprendre mon époque.

Pour être ce miroir crasseux qui reflète une parcelle de réalité crasseuse.



Le calvaire de Kim

Histoire troublante racontée par le père d'une jeune fille qui s'est suicidée après avoir été harcelée à maintes reprises par des éducateurs d'une école québécoise gérée par des kapos de camps de concentration. Personne n'a reçu de réprimandes.

L'histoire figure ici sur le blogue du père.

Les pleins de marde sont toujours en poste. Le pauvre père est démoli par une justice de marde et par des fonctionnaires qui se sentent au-dessus des lois. Partagez ce témoignage autour de vous pour qu'on puisse mettre le nez des intimidateurs dans leur caca.

***
Message du père:

La SQ a fermé l’enquête en juin 2015 et les personnes concernées sont toujours à l’emploi de cette commission scolaire. Ils n’ont jamais exprimé le moindre regret… Le directeur-adjoint est devenu directeur des ressources humaines de la commission scolaire.
Vous aimeriez commenter? Venez sur ma page Facebook:  http://www.facebook.com/leblogueaeric
Ajout: la suite du combat, à lire:
https://leblogueaeric.wordpress.com/2016/07/29/je-nabandonnerai-pas/

jeudi 28 juillet 2016

Ma caricature du jeudi...


La folie c'est répéter la même citation sans savoir d'où elle vient

Il m'arrive souvent de tomber sur une belle citation attribuée à Albert Einstein. Le problème c'est que je doute de l'authenticité de la citation. Il y a tellement de citations apocryphes qui circulent dans le monde qu'on a tort de ne pas s'assurer de la référence exacte.

Albert Einstein, plus que tout autre, est souvent victime de ce genre de falsifications. Le seul énoncé de son nom donnerait raison à n'importe quel primate. Comment peut-on douter des propos d'un tel génie? On le peut sans doute si ce génie n'a rien dit de tel...

J'en viens à cette phrase que j'ai si souvent entendue et que je ne trouve encore nulle part dans l'oeuvre de Albert Einstein: "La folie c'est se comporter de la même manière en s'attendant à un résultat différent." Que ce soit Einstein ou Tartampion qui ait dit cela, il n'empêche que cela me semble sensé.

Selon un texte de Michael Becker que j'ai lu sur l'Internet, Einstein n'aurait jamais dit ça. Il semble même que cette phrase ait été aussi attribuée à Benjamin Franklin et Mark Twain... Je ne suis donc pas le seul à en douter.

C'est d'autant plus ennuyeux que je trouve cette phrase géniale et porteuse de sens.

Le mythomane qui l'a inventé aurait dû se l'attribuer à lui-même au lieu de jouer avec notre esprit.

***

Une autre citation célèbre est attribuée faussement à Voltaire: "Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous ayez le droit de le dire." Il n'aurait jamais écrit ça. La méprise proviendrait d'un ouvrage de Evelyn Beatrice Hall publié sous le pseudonyme de S.G. Tallentyre en 1906 sous le titre The Friends of Voltaire. Elle y résumait une attitude de Voltaire. C'était comme si Voltaire disait ça. Ce n'était pas pour dire qu'il le disait vraiment... Et maintenant, on entend des tas de gens répéter cet aphorisme à gauche et à droite. "Comme Voltaire disait:..."

Voltaire ne disait ni n'écrivait cela.

***

Par conséquent, il serait plus raisonnable de n'employer que des citations que nous avons vraiment vu passer sous nos yeux, malgré l'effort intellectuel que cela requiert.

On ne passerait pas pour quelqu'un qui s'en tient aux idées reçues ou bien à l'exégèse des lieux communs.

On n'aurait pas l'air d'un tata qui s'arroge quelque autorité intellectuelle à rabais.

***

Je suis parti dans une toute autre direction que celle que j'avais prévu de prendre en m'installant devant mon clavier. Je voulais reprendre cette citation de Einstein que je trouvais appropriée pour juger de l'état du monde.

Par contre, cela me chicotait de ne pas l'avoir lue de mes yeux lue. Je me suis dit que j'allais parcourir le web pour lire autour de la référence exacte. J'aurais lu en un rien de temps une vingtaine de pages dans le texte original pour me faire une idée juste de la citation. Malheureusement, tout concourrait pour faire de cet excellent trait d'esprit une citation apocryphe. Du coup, j'en ai perdu mes moyens et mon propos... Au lieu de vous parler de la politique, du monde des idées fixes et autres balivernes, j'ai tout bonnement sombré dans une démonstration emberlificotée de points de vue didactiques.

Je m'en veux presque.

C'est pourtant le prix à payer pour l'honnêteté intellectuelle.

mercredi 27 juillet 2016

Insérer trente sous dans le gorille

Il est rare que je n'aie rien à dire. Puisque je ne peux pas me passer d'exercice, dont celui de faire glisser mes doigts sur le clavier de mon ordinateur, je finis toujours par trouver quelque chose à vous raconter.

Ma blonde, qui a le malheur de supporter mes propos intarissables du matin jusqu'au soir, et parfois au milieu de la nuit, a coutume de prévenir mes interlocuteurs en les priant "de ne pas mettre trente sous dans le gorille."

Vous déposez un mot, à l'instar d'une pièce de monnaie, et voilà que je remue ciel et terre pour vous livrer ma vision débridée des choses. Je saute du coq à l'âne puis de l'âne à l'âme, de l'âme à l'homme, de l'homme aux tartes aux pommes...

-Blablabla ble bli blo blu!!! que je déblatère.

J'abuse ensuite d'anecdotes et d'histoires insolites. Je brandis des citations. Je recommande de lire des livres. Je parle d'un film, d'un documentaire, d'une niaiserie découverte sur les médias sociaux. Puis c'est déjà l'heure de se coucher. J'ai mal à la mâchoire. J'ai la bouche sèche. Je vois des points scintillants. Bref, j'ai encore trop parlé... J'ai épuisé tous mes interlocuteurs. Je me suis épuisé moi-même.

Je me tiens pourtant coi dans la plupart des rencontres sociales.

Comme mon père, je suis un timide qui peut devenir exubérant si d'aventure on le pique dans le bedon avec un bout de bois.

Comme un ours, débonnaire, camouflé la plupart du temps dans la forêt, tout en représentant toujours une source potentielle de danger.

Certains trouveront que ce sont là de vilains défauts.

D'autres se diront qu'il vaut mieux fréquenter des ours que des protonotaires.

Et moi, eh bien je ne dirai rien qu'y vaille la peine d'être écrit.

Mes doigts ont obtenu leur part d'exercice.

Je puis me reposer de ce besoin impérieux de noircir des pages, de barbouiller, de semer à tout vent.

***

J'ai détruit des tas de dessins, des tas de textes, des romans, des poèmes, des trucs pas racontables.

Il m'en reste pourtant des tas.

Un jour, quand j'aurai tout dit, quand j'aurai pressé le citron jusqu'à la dernière goutte, il ne suffira que d'ouvrir ma boîte de Pandore pour découvrir d'autres facettes de mon écriture et de mon art.

D'ici là, je ne vais tout de même pas me reposer.

Chaque jour apportera son lot d'impressions et d'expressions.

Je vais encore partir d'un mot pour aboutir à un discours-fleuve.

C'est comme ça.

Que voulez-vous que j'y fasse, hein?

mardi 26 juillet 2016

Résister au fanatisme et aux idées fixes

"Le principe qui peut être énoncé, n’est pas celui qui fut toujours. L’être qui peut être nommé, n’est pas celui qui fut de tout temps. Avant les temps, fut un être ineffable, innommable." 
Lao Tseu, Tao-Tei-King, traduit par Léon Wieger

***

Douter ne fait pas partie de la palette de couleurs des fanatiques. En fait, ceux qui doutent devant les personnes qui n'ont que des idées fixes ne peuvent leur apparaître que sous les traits du traître ou du vendu.

Évidemment, les adeptes de tout poil vous diront qu'ils ont des convictions solides, ce qui ne peut évidemment pas être votre cas si vous remettez en doute leur bréviaire. Vous serez à surveiller étroitement si vous évaluez les faits autrement qu'en les regardant par le petit bout de la lorgnette. Vous serez cuit si vous ne lisez pas les bons auteurs ainsi que les bons livres autorisés par les scribes attitrés au service de quelque Grande Idée ou pharaon surhumain.

Les arguments céderont vite la place aux hurlements si vous osez leur faire entendre vos doutes quant à leur doctrine.

J'ai tenté maintes et maintes fois l'expérience en occupant tous les rôles, dont celui du fanatique.

J'ai été jeune, moi aussi. J'aurai cru en des conneries par pur conditionnement intellectuel.

J'ai pratiqué la religion catholique dès ma tendre enfance et il est possible qu'elle ait laissé des traces dans ma vision des choses. Ce sera le travail de toute une vie de me soigner des papes, des prêtres et autres guides tout aussi peu spirituels et toujours trop politiques.

Cela ne veut pas dire que je n'ai pas d'idées ni de convictions. Par contre, j'ai le malheur de considérer le monde avec un mélange de mépris et de pitié. Du mépris pour les soi-disant guides de l'humanité. Et de la pitié pour l'humanité qui souffre sous la conduite de ces esprits réducteurs.

Lao-Tseu disait que la Voie qu'il nomme n'est pas la Voie pour toujours. Dans la sagesse du Tao Tö King, comme dans toute sagesse digne de ce nom, il y aura toujours place au doute. La science elle-même considère ses réponses comme l'état actuel des connaissances qui peuvent être remises en question sur la base de nouvelles expériences.

Ce qui tient pour la sagesse ou la science est vu d'un mauvais oeil pour la politique et bien sûr la religion. Il faut croire ou périr dans tous les cas lorsque l'on embrasse un dogme. Le doute est comparable aux tentations de Satan, du serpent du Jardin d'Éden, bref de cette vision archétypale du corrupteur des bonnes moeurs dont se portent garants les gardiens de la Patrie et les prêtres de la Vertu.

Je conçois que ces grands inquisiteurs puissent trouver bien naïf de prétendre conduire des hommes avec des doutes et des hypothèses. Je comprends même pourquoi des types comme moi peuvent nuire à leurs plans. J'accepte, aussi difficile que cela puisse être, de vivre parmi des tas de gens qui ne me ressemblent en rien. D'ailleurs, je n'ai pas le choix. J'y vois tout bonnement l'obligation de vivre ensemble ici et maintenant, avec toutes les concessions et la relative permissivité que cela suppose.

Je ne sais pas tout à fait qui je suis et ne m'en sens pas plus mal.

Je sens que je suis, à tout le moins. de la poussière d'étoiles. Mon corps est un agrégat d'explosions cosmiques qui ont créé tous ces éléments dont je suis constitué. Ce qui semblera tout à fait ridicule pour quelqu'un qui est fier d'appartenir à un troupeau.

Je trouve mon mot à dire sur l'administration des choses humaines. Mes rêves passent souvent au second plan puisque personne n'a que faire de mes rêves. Et c'est sans doute mieux ainsi.

Je ne crains pas de pelleter des nuages et d'imaginer ce que d'aucuns considèrent encore impossible.

Par contre, je me tiens à l'écart des idéologies et systèmes de pensée qui se donnent tous les moyens pour atteindre un but toujours plus éloigné. Je me refuse à dresser des listes de traîtres et de vendus toujours plus longues. Je me refuse à traquer mes frères et soeurs humains pour donner raison à mes idées fixes, aussi nobles qu'elles puissent me sembler quand je m'y abandonne par une forme inconsciente de conformisme ou bien par refus momentané de mon unicité.

Que vous soyez fédéraliste ou souverainiste, socialiste ou libertarien, catholique ou musulman, juif ou athée, piéton ou automobiliste, vous serez mes amis si vous avez le coeur à la bonne place. Vous ne serez pas mes ennemis si vous ne faites pas consciemment du mal à votre prochain. Je vous pardonnerai toutes vos croyances, puisqu'il m'en reste un peu moi aussi, même si je prétends le contraire comme le dernier des faux-culs.

Cela dit, j'affirme que nous, les humains, sommes des crottes de nez dans l'univers.

Nos chicanes et nos guerres ont quelque chose de lamentable.

Elles témoignent de notre bêtise difficilement surmontable.

Elles disent, en quelque sorte, que nous regardons beaucoup trop de gauche à droite, d'une frontière à l'autre. Nous ne regardons pas suffisamment de bas en haut. Nous ne nous abandonnons pas assez à l'indicible et à l'infini.

lundi 25 juillet 2016

Cahier d'esquisses et propos sur l'art

Un vieil album vierge de photographies que j'ai converti
en cahier d'esquisses au crayon à l'huile
  • « Dis-moi ce que tu manges : je te dirai ce que tu es. » Brillat-Savarin, Physiologie du goût


Il m'arrive de penser que j'ai dû rayer une forêt de la carte à force de dessiner et d'écrire.

Cela fait déjà plusieurs années que je barbouille du papier.

Ma mère a cru un temps que cela pourrait me rendre fou. C'est vrai qu'en plus de noircir des milliers de pages de monstres et propos blasphématoires je lisais des tas de gros livres aux titres plus ou moins effrayants: L'Antéchrist, Par-delà bien et mal, Les prospérités du vice, etc.

Je ne faisais pourtant que laisser sortir le méchant. Je me guérissais sans le savoir de mes monstres intérieurs.

Je pratiquais avec plus ou moins d'instinct ce que prêche le Bardo Thödol, c'est-à-dire réaliser que les monstres ne sont que des représentations de notre propre esprit, aussi sale soit-il.

En vieillissant, j'ai fini par visiter des thèmes plus bucoliques. Je me suis en quelque sorte libéré de mes visions ténébreuses du monde pour accéder à plus de lumière. Au lieu de dessiner des monstres qui vomissent des ectoplasmes, je me suis mis à reproduire des fresques de gens gras dur et souriants.

Le gastronome Brillat-Savarin disait dans la Physiologie du goût que l'on est ce que l'on mange. C'est vrai aussi pour l'art. On devient ce que l'on met de l'avant. Quand je dessinais des personnages torturés mon âme n'échappait pas au désespoir. Maintenant que je m'amuse à écrire des récits déjantés et candides, à peindre des gens souriants, à jouer des airs joyeux sur mes instruments de musique, eh bien je me sens heureux. Je mange du bonheur et c'est du bonheur que je suis devenu, malgré tout...

Cela dit, j'ai profité de ma fin de semaine pour barbouiller un vieil album de photographies vierge. Je me disais que dessiner sur du noir serait tout aussi cool qu'inusité. J'ai donc sorti mes crayons à l'huile et j'ai joué avec les couleurs. Vous pouvez voir le résultat ici même. C'est sans prétention. Cela dit tout simplement que j'ai encore un coeur d'enfant. Ce dont je suis fier. Les gens qui ont un coeur dit d'adulte sont généralement tristes, insignifiants et même inquiétants.

Évidemment, je prêche pour mon camp, c'est-à-dire pour ceux qui n'ont rien à faire des apparences et des faux-semblants.


Noir comme en plein soleil...
Le goéland me regardait de côté tandis que je le dessinais.


J'sais pas c'est qui. Une crisse de folle, mettons...

Un arbre du Parc Pie-XII qui devrait changer de nom parce que Pie-XII n'a rien à voir ici, pas plus que le dalaï-lama.



dimanche 24 juillet 2016

Nouveau billet pour le Hufftington Post

Mon nouveau billet pour le Hufftington Post. C'est ici

Bernie Moses du Lac Moose

Une brume apaisante flotte au-dessus du lac. Si l'aube n'avait pas cette apparence fantomatique on n'y trouverait rien de mystérieux. Du coup, les états de grâce seraient amoindris. C'est du moins ce que se dit Bernie en son for intérieur. Bernie qui n'a pourtant rien d'un poète et encore moins d'un pelleteur de nuages. À vrai dire, Bernie Moses n'a l'air de rien et c'est probablement pour cette raison qu'il est heureux.

On trouve peu d'humains dans le secteur du Lac Moose. Le plus proche voisin de Bernie Awachiche a un camp de chasse à dix kilomètres au Nord. Bernie ne le voit qu'à l'automne et c'est à peine s'ils se parlent lorsqu'ils se croisent.

-Wachiya! Vous r'venez pour la chasse, hein?

-Wachiya! Ouais... répondaient les trois ou quatre chasseurs Cris.

-Bonne chasse!

-Migwetch m'sieur!

Et ils repartaient sur leur quatre roues.

Pourquoi le vieux Bernie, car il était vieux depuis toujours, pourquoi s'est-il enfoncé si loin dans le bois, au milieu de nulle part? Eh bien la réponse se trouve dans cette brume apaisante qui flotte au-dessus du lac, mais aussi dans le chant des oiseaux, le bruissement des feuilles, l'absence presque totale de sons humains. Bertrand entend quelques détonations de fusils l'automne pendant une ou deux semaines puis c'est terminé pour une année de plus. Les Cris chassent de moins en moins dans le secteur. Leurs enfants passent tout leur temps sur l'Internet.

Aussi curieux que cela puisse paraître. le vieux Bernie. puisque je vous répète qu'il est vieux. n'a pas de véhicule. Il a fait sienne cette vieille superstition autochtone selon laquelle l'homme ne doit pas faire usage de la roue pour piétiner la terre sacrée. Ce qui explique en partie pourquoi les autochtones de l'Île de la Tortue refusaient cette invention qui nous semble aller de soi. Le Grand cercle de la vie ne peut pas être détourné de sa vocation spirituelle. Bernie  en conclut que l'homme moderne ne respecte plus rien. Il n'y a plus de vrais humains. Il n'y a plus d'Eeyous.

Il y a pourtant des contradictions chez ce bon vieux Bernie. Il possède un téléphone satellite et un radio-émetteur. Il s'en sert pour placer des commandes sur la réserve qui lui envoie des provisions de temps à autres par hélicoptère.

Le chef de la réserve, son neveu en l'occurrence, a une procuration pour gérer les affaires bancaires de son oncle Bernie qu'il allait voir au moins une fois par année pour lui faire signer plein de la paperasse. Son neveu est d'ailleurs avocat et a obtenu quelques centaines de millions pour sa tribu après que les Blancs eurent bâti un barrage sur leur territoire sans leur consentement. Tout le monde vit théoriquement mieux depuis ce temps-là et le neveu de Bernie fût prier de devenir leur chef. même s'il passe le plus clair de son temps dans son jet personnel, entre Montréal et Vancouver, à discuter de points de droit sur les revendications des Premières Nations.

Évidemment, je m'égare un peu.

L'essentiel, c'est encore cette brume apaisante qui flotte au-dessus du Lac Moose. C'est le souffle du vent qui fait bruire les feuilles. C'est le hululement des hiboux. La plainte des caribous. Le sifflement de la bouilloire sur le feu qui rappelle que c'est l'heure du thé.

-Ah! Un bon thé! Y'a-t-il quelque chose de mieux qu'un bon thé? se dit Bernie en lui-même.

Puis, aujourd'hui comme hier. Bernie contemple son royaume.

Et il s'y trouve bien, loin du monde et de ses machinations, loin de ses nouvelles, loin de ses désordres.

Un jour, il mourra. Avec de la chance il sera inhumé là où il se trouve lorsque l'on retrouvera son corps inerte dans sa cabane perdue au milieu de nulle part.

La brume apaisante flottera encore sur les eaux du Lac Moose.

Et son esprit rejoindra celui de ses ancêtres.

Et alors, comme Bernie le dit lui-même, il sera pour toujours le gardien et le protecteur des lieux.

Quiconque voudra s'en prendre à son lac aura affaire au fantôme de Bernie.

Même le Windigo fera pâle figure en comparaison.

Mais laissons-la ces fantasmes de vieil indien solitaire.

Il reste encore du thé et bien des heures à contempler chaque petit détail de la vie pour y trouver encore plus de questions sans réponses.


samedi 23 juillet 2016

Rester dans la marge

Je ne me suis jamais senti à l'aise au sein d'un groupe parce que c'est toujours le plus bas dénominateur commun qui y fait un triomphe. Cela ne veut pas dire que je suis un esprit supérieur. Cela ne dit rien de plus que les groupes sont invariablement menés par les plus cons.

Cela explique, en partie, mon caractère que l'on pourrait qualifier de sauvage.

Je déteste les événements publics, les coquetels, les 5 à 7, les vernissages, les lancements, les conventions, les assemblées générales ou publiques, les parties de hockey, les tournois de pétanque, les mariages, les baptêmes, les funérailles et j'en passe. Je me plie à ces coutumes quand l'obligation se fait sentir, rien de plus.

Dans un groupe, je me sens toujours comme un chien dans un jeu de quilles.

Je ne sais pas où me placer, quelle attitude adopter, quelle phrase prononcer pour être  au diapason de la meute.

Tant mieux si d'autres que moi excellent dans ce genre de rencontres sociales.

Ce n'est pas mon cas et ce n'est certainement pas par misanthropie. En fait, c'est pour ne pas gâcher mon amour de l'humanité que je tiens mes distances.

J'aurai longtemps fait des efforts pour me conformer, rentrer dans le moule, faire semblant de rire ou de pleurer avec tout le monde. Pourtant, plus je chassais mon naturel et plus il revenait au galop.

J'ai fini par m'accepter tel que je suis en trouvant des amis qui comprenaient que mon mépris des groupes n'était pas quelque chose de pathologique, mais la condition fondamentale pour entretenir la vie de mon esprit et une certaine chaleur humaine.

Évidemment, mon tempérament sauvage m'impose mille et un sacrifices, dont celui de ne pas bénéficier d'un solide réseau social. Si j'étais plus cauteleux, plus flatteur, sans doute que je grimperais plus rapidement dans la hiérarchie sociale. Cependant, ce n'est pas ce que je recherche. Je veux atteindre la quiétude, pour ne pas dire l'ataraxie, la sérénité. Je me sens insensible à toutes ces courbettes et concessions qu'il faut faire pour s'afficher aux côtés d'un con célèbre. Je veux passer dans ce monde comme une ombre et disparaître comme une rosée du matin.

Je ne crois pas énoncer ici de grandes vérités.

Ce n'est somme toute qu'un autre de mes états d'âme.

Comme je ne suis pas seul à le penser, le simple fait pour moi de le dire pourrait libérer d'un énorme fardeau tous ceux et celles qui s'acharnent sans succès à "faire partie de la bande."

Restez dans la marge. chers amis, et soyez-en fiers.


vendredi 22 juillet 2016

Goules de mer, goules de terre et goélands

Port de Trois-Rivières, vendredi 22 juillet 2016, 6h45 du matin
Un rien m'allume et peut déclencher ma logorrhée.

On peut me parler d'un cure-dent et voilà que je trouve mille et une anecdotes dans ma mémoire pour alimenter un monologue qui pourrait durer des siècles.

Mon explication à cette faculté, que d'aucuns considèrent comme étant une tare intellectuelle, provient du fait de vivre à proximité du fleuve. De Rimouski à Montréal, la parole des gens du fleuve coule comme de l'eau vive. Ce n'est pas pour rien que Gilles Vigneault chantait que les gens de son pays sont gens de paroles et gens de causeries qui parlent pour s'entendre...

Bref, c'est ma façon d'être patriote que de raconter toutes les niaiseries qui me viennent à l'esprit. C'est ma façon de faire vibrer cette belle langue française au diapason du Nouveau-Monde.

Pour ce qui est du fleuve, je suis allé le visiter ce matin. J'ai le bonheur de vivre à moins de 800 mètres du grand fleuve Magtogoek (anciennement Saint-Laurent). Comment pourrais-je me priver de cette vue magnifique?

Le fleuve Magtogoek et la rivière Tapiskwan Sipi (anciennement Saint-Maurice) ont été les aires de jeux de mon enfance. Encore aujourd'hui, je ne me lasse pas de les contempler pour y trouver quelque réponse silencieuse aux questions trop brûlantes de la vie.

Mon regard porte souvent à l'Est pour me rappeler, entre autres, les origines de mon père. Il a grandi à Sayabec ainsi qu'à Sainte-Luce-sur-Mer. Il rêvait d'y finir ses jours. Il passa sa vie à porter son regard au loin, là-bas, chaque fois qu'il nous emmenait voir le fleuve. Peut-être que la vie y était rude, mais sans doute moins misérable que la vie dans un logement sale et étouffant de Cap-de-la-Madeleine où sa famille était atterrie.

***

Ce matin, des tas de goélands m'ont accueilli. À leur plumage d'un blanc éclatant, je savais que j'avais affaire à une bande de mâles. Où se tiennent leurs femelles? Je n'en sais rien. Peut-être couvaient-elles leurs oeufs.

Les goélands pourraient être mes oiseaux préférés si ce n'était de leur comportement de charognards qui finit par me dégoûter malgré la meilleure volonté du monde. Leur vol est tout aussi gracieux que leur plumage. Cependant, j'ai toujours en moi le souvenir vif du festin que s'étaient offerts des goélands de mon vomi la fois que j'avais dégueulé dans un stationnement. J'avais même revomi par-dessus tellement ça me soulevait le coeur...

N'empêche qu'elles sont jolies les goules de mer, les seagulls comme disent les Anglais, quand je fais abstraction de la base de leur alimentation.

Elles s'envolent dès qu'on les approche pour une raison qui m'échappe. Au nombre qu'elles sont, elles pourraient faire fuir n'importe quel singe et même un gorille comme moi. Mais non! Elles ne tiennent pas à prendre toute la place comme le font les membres de mon espèce. Elles se contentent d'un rien, les goules de terre, les goé... lands.

-Après vous les primates! qu'elles semblent nous dire. Mangez les premiers, nous trouverons bien quelque chose à nous régaler ensuite. Un rien nous suffit. On accepte tout. Même votre vomi...

***

Comme je vous le disais d'entrée de jeu, il ne suffit que de me lancer un thème pour que je devienne intarissable. Je vous imagine déjà en train de bayer aux corneilles de lire ce billet-fleuve.

-Cet abruti va-t-il finir par y mettre un point final? que vous vous dites.

Eh bien, j'y arrive presque.

Vous pouvez terminer votre lecture ici dans l'hypothèse où votre voyage dedans ma tête est allé trop loin.

Pour les autres, qui ne trouvent rien de mieux à faire, je me permets de vous offrir un autre texte que j'ai écrit à propos des goélands. C'est tiré d'une histoire que j'ai vécue à Thunder Bay il y a déjà plus de trente-cinq ans. Cela ne me rajeunit pas. Et ce n'est pas le genre d'histoires dont on se vante généralement...

Cela vaut ce que cela vaut. Et ça s'intitule La parabole de la Baie du Tonnerre.

Une autre photo que j'ai prise ce matin au port de Trois-Rivières...



jeudi 21 juillet 2016

À propos de la digestion de Spartacus et des esclaves

Comme d'habitude, je suis trop lâche pour jouer à l'universitaire qui vous livre les citations exactes avec la maison d'édition, l'année et le lieu de la publication, le nombre de pages du recueil, alouette!

Je suis capable de jouer ce jeu. Je l'ai déjà fait. Cependant, je ne fais plus partie des milieux académiques et ma carrière compte heureusement pour rien dans l'expression de mes idées.

Pour couper court à ce préambule, j'ai lu Spartacus de Arthur Koestler il y a fort longtemps. Ce même Spartacus qui a mené une révolte d'esclaves à Rome il y a plus de deux milles ans.

Ce prénom légendaire a été adopté par tous les révolutionnaires du monde comme un modèle à suivre.

Spartacus était un gladiateur, c'est-à-dire un esclave. Il devait se produire devant d'honnêtes citoyens romains qui s'amusaient à voir les gladiateurs s'égorger les uns les autres. Spartacus aurait lancé un syndicat parmi les gladiateurs. Plutôt que de s'entre-tuer, pourquoi ne pas retourner nos glaives contre les spectateurs qui s'amusent à nous voir mourir? L'idée fût jugée excellente. Spartacus et les siens s'élancèrent sur les spectateurs, glaives en main. Puis ils s'enfuirent dans l'espoir de regagner leur patrie. Comme les armées romaines les pourchassaient, ils changèrent de stratégie. Ils fédérèrent tous les esclaves des environs pour monter leur propre armée.

Les honnêtes citoyens romains eurent peur d'y passer. Les esclaves n'obéissaient plus et prenaient la clé des champs pour aller rejoindre Spartacus et sa bande.

Pour revenir à Arthur Koestler, je me rappelle d'un passage de son roman Spartacus où de riches propriétaires romains philosophent sur cette révolte d'esclaves qui leur semble tout à fait insensée.

-Si les esclaves ont la rage, c'est sans doute à cause d'une mauvaise digestion... Ça les rend agressifs... Ou bien c'est tout simplement de la jalousie... Ils sont jaloux de notre statut alors que tout le monde sait que les dieux en ont décidé ainsi... Bref, Spartacus et les siens sont des êtres médiocres bourrés de ressentiment... On gagnerait à enseigner la philosophie à nos esclaves, à leur faire comprendre l'ordre naturel des choses...

Ils ne disent pas tout à fait ça dans leur dialogue, mais c'est ce que j'en ai retenu trente ans après avoir lu ce roman de Koestler.

Ce passage de Spartacus est demeuré ancré dans ma mémoire.

Chaque fois que j'entends des repus et des bourgeois philosopher sur les causes de l'insoumission, je reviens à ce passage.

Comme je reviens aussi à la Salle numéro 6 de Tchekhov, une nouvelle dont l'action se passe dans un hôpital de province où les fous sont attachés après leur lit et maltraités. Le directeur de cet hôpital préfère philosopher.  La corruption règne partout dans la Russie du Tsar et lui-même ne voit pas l'intérêt d'y mettre un terme dans sa propre administration. C'est dans l'ordre naturel des choses... Que voulez-vous? Il ne comprend pas pourquoi les fous se plaignent de peccadilles. Pourquoi ses fous n'ont que faire de la sagesse et des beaux traits d'esprit.

-Enlevez-moi d'abord mes chaînes! hurle un fou qu'il a choisi pour interlocuteur.

Évidemment, le directeur n'enlève pas les chaînes. Il regarde le fou enchaîné avec pitié et condescendance. À la fin de la nouvelle, le directeur lui-même se retrouve pensionnaire de son propre hôpital, enchaîne à un lit après une crise de neurasthénie. Et vous savez quoi? Il n'a plus envie de philosopher. Lui aussi se met à hurler. Lui aussi réclame tout à coup qu'on lui enlève ses chaînes...

Loin de moi l'idée de remettre en question l'amour de la sagesse. Sinon pour rappeler que la sagesse consiste aussi à reconnaître le besoin qu'un homme peut avoir de devenir libre. Que l'appel de la liberté n'est ni de la jalousie, ni du ressentiment, ni de la rage. Mais tout simplement de la justice naturelle. Un besoin impérieux de ne pas être enchaîné.

Pour ce qui est de Spartacus, on ne sait pas comment il est mort.

On sait cependant que son armée de pouilleux a été vaincue.

Six milles des partisans de Spartacus furent crucifiés tout le long de la Via Appia, de Capoue jusqu'à Rome. C'était pour rappeler aux esclaves l'ordre surnaturel des choses.

Aujourd'hui encore, Spartacus est célébré par tous ceux qui aspirent à la liberté.

On a fait de lui et des siens un symbole fort de lutte contre toutes les formes d'esclavage.

On en a fait des documentaires, des romans, des films et même une télé-série.

On en fera sans doute une émission de télé-réalité un jour ou l'autre, pas loin de chez-vous. Avec de vrais acteurs, pancartes en main.

Et il se trouvera encore d'honnêtes gens parmi nos élites pour philosopher sur la digestion de ceux qui combattent l'injustice...


mercredi 20 juillet 2016

Poèmes intéressants de Magoua Lagouache

Cliquez ici pour lire les Poèmes intéressants...
Extrait:
Je rêve d’un poème
Je rêve d’un poème
Qui serait affiché sur un mur de Trois-Rivières
Au Festival International de la poésie
Je rêve d’un poème hilare et bon enfant
D’une incitation à pondre de la poésie
Et à jouer au poète
Je rêve d’un poème qui dirait simplement
Je vous aime

***

Le document qui suit est un canular qui n’aura pas eu lieu. J’ai rédigé ces poèmes en quelques minutes. Je me suis ensuite créé une fausse identité, Marc-André Lagarde, alias Magoua Lagouache, chargé de cours en littérature au Cégep de Lévis.


Mon but était de présenter ces poèmes ridicules à toutes les maisons d’édition de poésie du Québec. Je me disais qu’ils étaient assez nuls pour qu’on les publie. Tous les poncifs de la poésie québécoise s’y trouvent.


Si j’avais bénéficié d’un quelconque intérêt, j’aurais dévoilé mon canular, bien entendu.


Le hic, c’est que cette farce, que je trouvais excellente, a perdu beaucoup de force dans les jours qui suivirent. De sorte que j’ai abandonné ce canular.


Si je me permets de vous l’offrir, tout en étant parfaitement conscient de ses défauts, c’est pour susciter votre pitié face à mes coups d’épée dans l’eau.


Voici donc les Poèmes intéressants de Magoua Lagouache.


Alea jacta est…


Gaétan Bouchard
Piètre poète, comme tout le monde

Trois-Rivières, le 20 juillet 2016

***

Vous trouverez le texte ici.

Si ce n'est pas déjà fait...

Le spoucheniche et l'homme sur la Lune

Germaine passe ses étés sur son perron à regarder la Lune et la lueur des quelques rares étoiles qui parvient jusqu'à nous en dépit des lumières de la ville.

Elle est à sa retraite depuis plus de vingt ans et s'occupe de contempler le monde avec son regard tout aussi naïf que candide.

Tout est vieux chez elle: sa peau, ses cheveux, sa chaise berçante, ses meubles, son chat, ses appareils électroménagers, sa vaisselle, ses chaudrons. Elle a fini d'acheter. Elle a tout ce qu'il lui faut et bien plus encore. Elle en a même trop.

Germaine tricote encore des pantoufles dans sa chaise berçante tout en observant ce que Pascal appelait "la profondeur des espaces infinis".

Elle a remarqué qu'il y avait une étoile qui filait tous les soirs dans le ciel à une vitesse hors de l'ordinaire.

-Pour moé c'est le spoucheniche...

-Le quoi? questionne son voisin, un astrophysicien qui trie des fruits et légumes pourris pour le compte d'une banque alimentaire.

-Le spoucheniche... L'affaire des Russes... Avec Yougi Margarine... I' vole dans l'ciel tous 'es soirs, le spoucheniche...

-Vous voulez dire le Spoutnik madame Germaine?

-Oui, le spoucheniche...

-Ça pourrait tout aussi bien être un autre satellite madame Germaine... Il y en a des milliers qui tournent autour de la Terre.

-P't'être bien, mais moé ej' connais jusse el' spoucheniche...

-Vous savez qu'aujourd'hui, le 20 juillet, cela fera 47 ans pile que l'homme marchait sur la Lune?

-C'est depuis c'temps-là qu'ça va mal su' 'a Terre. De qu'est-cé faire qu'l'homme fallait qu'i' aille su' 'a Lune, hein? De qu'est-cé faire qu'i' fallait aller la déranger? A' dérangeait parsonne la Lune! Mon vieux père l'a toujours dit: quand qu'les hommes iront su' 'a Lune ça sera l'début d'la Fin du monde! El' monde d'viendra méchant pis i' s'mettront à faire toutes sortes de niaiseries! J'y va's-tu su' 'a Lune moé? Non! De qu'est-cé faire qu'i' fallait aller foutre la marde su' 'a Lune? Y'a déjà assez d'méchanceté icitte... Et pis ça coûte cher comme le diable! Au lieu d'aller su' 'a Lune pis d'faire tourner des spoucheniches, i' devraient s'occuper des vieux pis des malades... Bin non! I' faut qu'i' fassent leu' frais dans leu' grosses fusées pis leu' gros chars! On connaît ça!

Germaine, voyez-vous, a des idées bien arrêtées sur la conquête spatiale même si elle n'y comprend rien.

Sa vision du monde est d'une extrême poésie qui n'est pas vice puisqu'elle n'aura hérité que de la pauvreté.

L'astrophysicien lui explique parfois que la Terre est un bolide qui file à toute vitesse autour de Soleil, que le Soleil tourne encore plus vite autour du trou noir au centre la Voie Lactée et que notre galaxie elle-même fonce dans l'univers à une vitesse qui dépasse l'entendement.

Germaine dit oui, oui, bien entendu, par politesse. Mais c'est clair qu'elle n'y comprend rien.

L'instruction, ce n'est pas sa spécialité.

Elle est meilleure pour tricoter des pantoufles.

Ou bien pour fricoter des ragoûts.

Ce qui n'est pas le cas de l'astrophysicien qui travaille à bas salaire sur un programme d'aide gouvernementale qui lui permet de trier des fruits et légumes pourris.

Il ne sait pas tricoter des pantoufles ni se faire à manger.

Il ne sait que des trucs inutiles, comme la première fois que l'homme a marché sur la Lune ou bien le nom exact des satellites qui nous passent sous le nez.

Ce n'est pas avec ce genre de connaissances qu'on fait des enfants forts.

Et Germaine, on dira ce qu'on voudra, en a tout de même enfanté une bonne dizaine, dont un ingénieur, une chirurgienne, un avocat et un plombier. Les autres sont très gentils aussi et alternent les périodes de travail avec le chômage et l'aide sociale, comme tout le monde quoi.


Cela s'est passé un 20 juillet...


"Un petit pas pour l'homme, un grand pas pour l'humanité."

Neil Armstrong, le 20 juillet 1969

mardi 19 juillet 2016

Réhabilitation, rédemption, criminalité et terrorisme

L'espoir en la réhabilitation et la rédemption du bandit est ce qui distingue notre société de la société américaine. Par conséquent, il y a moins de meurtres, moins de crimes et moins d'attentats dans notre société. Les apôtres de la dureté prétendent protéger la communauté en défendant des politiques plus coercitives et obtiennent des résultats médiocres au plan strictement rationnel. Flatter l'ego revanchard des peureux est contre-productif. Comme l'écrivait Lao-Tseu, l'eau est insaisissable, douce et incolore. Pourtant, c'est elle qui sculpte les montagnes.

Habillés des pieds à la tête en plein été...

Habillés des pieds à la tête...
Les hommes et les femmes qui allaient à la plage s'habillaient des pieds à la tête du temps des premières photographies. On les imagine suant leur vie dans ces uniformes inconfortables qui étaient sensés préserver la pudeur prescrite par la Sainte Église crétine.

Savonarole, le dictateur de la république théocratique de Florence, avait d'abord contribué à ces attaques contre le paganisme renaissant. Il s'était outré contre ces femmes qui exhibaient de plus en plus leur poitrine et leurs jambes dans les rues de Florence. Il a incité les Florentins à jeter dans son bûcher des vanités toute une flopée d'oeuvres d'art qui ne nous sont malheureusement pas parvenues. Botticelli lui-même, dans un accès de piété ridicule, y balança ses nus. Quelle perte pour l'histoire de l'art! Mais quel triomphe pour la religion sale...
Savonarole et son bûcher des vanités...

Le protestantisme en rajouta une couche, pour ne pas dire des couches. Les femmes et même les hommes durent bientôt s'emmurer vivants sous plusieurs couches de vêtements.

Il faudra attendre la Première guerre mondiale pour que la société s'émancipe des gardiens de la vertu. Le mouvement féministe, on ne le dira jamais assez, aura grandement contribué à la libéralisation des moeurs. Ce qui profita autant aux femmes qu'aux hommes.

Les femmes purent enfin montrer leur poitrine, leurs genoux et même porter des pantalons.

Woodstock
D'une décennie à l'autre, la chair gagna du terrain, un centimètre à la fois, sur les vêtements étouffants. La religion recula partout en occident. On se mit à déserter les églises. Puis ce fût l'été de l'amour, the summer of love, le flower power. Les jeunes gens se mirent à se baigner tout nus, cheveux au vent, fraîcheur entre les fesses. C'en était fini de la mainmise des curés sur les moeurs. On allait enfin vivre librement l'amour, la plage et l'été.

***

Hier, j'ai vu une jeune femme qui se rafraîchissait sous les jets d'eau d'une fontaine du centre-ville de Trois-Rivières. Elle portait une jupe très courte. Et elle était seule sous le jet d'eau sans que personne ne l'inquiète. Elle était, pour tout dire, libre comme l'air.

Je ne vous dis pas ça pour passer pour un vieux mononcle vicieux.

Ce que j'ai vu, c'était sa liberté.

Cette liberté que des religieux de toutes obédiences risquent toujours et encore de menacer.

La jeune femme a pu exhiber ses cuisses et ses épaules en plein centre-ville sans que personne ne vienne lui faire la morale, sans qu'un crétin ne vienne l'intimider et l'empêcher d'agir comme bon lui semble. Cela peu paraître anodin. Ça ne l'est pourtant pas. Beaucoup d'endroits dans le monde ne permettraient pas qu'une femme soit seule sous une fontaine en cette tenue qu'on jugerait provocante ou impie.

J'imagine que la jeune femme a pu regagner sa maison sans se faire suivre par des connards.

Elle a probablement pu baiser avec n'importe qui ou n'importe quoi si le coeur lui en disait.

Comme elle a très bien pu lire un livre que l'on interdirait aussi dans ces pays où la religion prend toute la place.

***

Je ne tiens pas en haute estime la religion, vous l'aurez sans doute deviné.

Je laisserai bien sûr aux gens le soin de pratiquer le culte qu'ils veulent tout en me méfiant avec raison des attaques que les religieux voudront toujours commettre envers nos libertés.

Un prêtre ne pourra jamais représenter la tolérance et encore moins la liberté.

Il est le gardien d'une illusion, le protecteur du mensonge, le promoteur du dégoût de vivre.

Nous devons nos libertés à tous ces gens qui ont dit non aux prêtres, cette engeance de l'humanité.

Il sera toujours nécessaire de les garder à l'oeil pour s'assurer qu'ils ne commettront pas de nouveaux crimes contre la nature humaine.

C'est dans la génétique du prêtre que de faire souffrir ses semblables, surtout lorsqu'il prétend les aimer.

À cet égard, je suis pleinement anticlérical.

Tous les clergés et toutes les religions organisées menaceront toujours cette jeune femme en robe courte qui se rafraîchit sous une fontaine du centre-ville.

Chacun a le droit d'être dans la nature tel qu'il ou elle a été conçu.

C'est un droit aussi fondamental que de respirer.

C'est même un devoir de résistance envers les religions stupides et aliénantes.




Femmes emprisonnées en burqas





Le printemps de Botticelli







lundi 18 juillet 2016

Mon nouveau billet pour le Hufftington Post

C'est ici.

C'est l'été et il fait bon vivre...

À force de parler de guerre, de terrorisme, de pollution ou d'esclavage je finis moi-même par ne plus avoir envie de me lire. C'est l'été et il fait bon vivre. Les poissons sautent dans l'eau et le coton est en fleurs. C'est ma traduction littérale de la chanson Summertime, cet appel à la candeur.

Je ne suis pas tout à fait candide, vous vous en doutez bien. Sous mes dehors empreints de douceur se cache un animal féroce que j'ai appris à tenir en laisse pour ne pas finir mes jours en prison.

Cela dit, il serait inconvenant de croire que je base mes réflexions sur ma rage ou bien un quelconque ressentiment. Elles se fondent essentiellement sur un certain idéal de justice sans lequel je serais bien incapable de m'indigner. Je sais bien que Spinoza disait qu'il ne fallait pas rire, ni pleurer, mais comprendre. Il appert que je ne suis pas Spinoza et que Spinoza ne sera jamais ce que je suis, ne serait-ce que du fait de ne plus être du monde des vivants.

Par-delà toutes ces obligations que je me donne de partager mes doutes et mes lamentables points de vue, il y a d'abord et avant tout cette quête d'authentiques états de grâce.

Vous comprendrez facilement que je ne les trouve pas dans les poncifs, les clichés, les rituels ou les danses en ligne. Sauvage comme je le suis, j'ai besoin de mystères qui ne s'expliquent pas par des réponses fades et provisoires. Je ne trouverai jamais la paix intérieure dans des discours inutiles ânonnés par les tromperies de la renommée.

J'atteins mes états de grâce d'une manière que je ne saurais expliquer sans les réduire à néant. Bien que je sois un homme de mots, quelqu'un qui parle manifestement trop, j'apprécie les vertus de l'introspection.

Évidemment, ma vie intérieure ne serait pas aussi bien comblée si je n'avais pas Carole, qui est bien plus que ma blonde. C'est mon havre de paix. C'est la plus belle récompense que la vie m'ait donné. C'est mon amour.

Auprès d'elle, je ne ressens plus ces doutes et ces insatisfactions caractéristiques des amours tristes. Je suis là pour elle comme elle est là pour moi.

On passe parfois sa vie à la manquer seulement parce que l'amour n'est pas au rendez-vous. Tous les lieux et tous les événements semblent dépeupler quand l'amour n'y est pas. C'est du moins ce que j'ai déjà ressenti en étant seul ou bien avec la mauvaise personne. J'ai moi-même été cette mauvaise personne pour des amours anciennes et déchues.

C'est l'été et la vie est douce...

J'en suis encore à méditer et à vous emmerder avec mes mots.

Vous vous dites sûrement que je gagnerais à me la fermer.

Que je pourrais, tout comme vous, regarder le foin pousser.

Je vous promets de le faire après avoir mis le dernier point à ce billet.

Si vous ne l'avez pas lu jusqu'au bout, je ne vous en voudrai même pas.

Même moi, je me demande si je vais le relire...

Un peu de musique avec ça?

Pourquoi pas.

On ne se fait pas de mal à se faire du bien.


dimanche 17 juillet 2016

Ti-Wézo Lepage est un homme bon

Les gens bons ne doivent pas nécessairement être confondus avec les honnêtes gens. On peut très bien être une bonne personne tout en étant pas honnête selon les termes de ces préjugés sociaux qui prennent parfois l'appellation de lois. Comme l'on peut tout aussi bien être une mauvaise personne tout en étant honnête.

Prenons le cas de Ti-Wézo Lepage. Ce gars-là vend des cigarettes sur le marché noir ainsi que d'autres produits qui se fument et qui font rire. Aux yeux de la loi, c'est un criminel. À mes yeux, qui l'ont vu aussi multiplier les bonnes actions, c'est un grand monsieur, un maudit bon gars. Il donnerait sa chemise même s'il n'en a que deux plutôt sales et élimées. Jamais sa porte n'est fermée à qui que ce soit. Les misérables profitent amplement de sa générosité proverbiale. Rien ne lui fait plus plaisir que d'organiser des repas avec tous ceux qui traînent autour de lui. Son logement est une vraie cour des miracles. Tout ce qu'il y a d'éclopés, de prostitués et de petits malfrats se pointent chez-lui pour récupérer un peu de sa bonne humeur et de sa candeur. Les profits de ses crimes, pour tout dire, il les dépense essentiellement avec ces flopées de trous du cul.

Richard-Antoine Dumoulin est tout le contraire de Ti-Wézo Lepage. Cet homme triste et gris n'a rien de malhonnête. Tout ce qu'il fait a toujours lieu dans les limites de la loi et des conventions établies. Il se targue d'être un honnête homme et se félicite d'être couvert d'honneurs tout autant que de diplômes. Pourtant, ce journaliste est pétri de méchanceté, de mépris et d'arrogance. Les mendiants, pour lui, sont tous des profiteurs qui veulent s'acheter de la drogue. Les assistés sociaux sont des parasites qui se laissent vivre par le labeur d'autrui. Les fumeurs de marijuana sont des rêveurs incultes qui contribuent à la faillite des États. Et ainsi de suite. Tout ce qu'il de bon, en fait, c'est lui et lui seul.

La maison de Dumoulin est bien sûr interdite d'accès aux prostituées, aux drogués et autres quémandeurs. En fait, peu de gens sont acceptés dans le cercle de Dumoulin. Contrairement à Ti-Wézo Lepage, cet honnête homme ne tolère que la présence de ses pairs, des gens semblables à lui qui lui permettent de s'élever dans le monde plutôt que de se rabaisser au niveau de ceux qui vivent dans la dèche et l'échec permanent.

Ti-Wézo ne critique jamais Dumoulin. Il n'a pas la tête à se bourrer de ressentiments. Il ne lui inspire que de la pitié. Il trouve que Dumoulin rate quelque chose ici-bas tout autant que là-haut.

Dumoulin tape sur Ti-Wézo aussi souvent qu'il le peut. Il méprise royalement ce vendeur de cigarettes qui boit de la bière sur son perron en passant le joint à tous les crottés qui viennent le visiter et lui donnent de grandes tapes dans le dos.

Oui, Dumoulin est un honnête homme.

Et, oui, Ti-Wézo est un homme bon.

Évidemment, tout a mal fini pour Ti-Wézo. Dumoulin en avait assez de le voir mener la dolce vita jour après jour avec l'argent de ses taxes et de ses impôts.

Dumoulin, en parfait honnête homme qu'il est, l'a dénoncé anonymement auprès du programme Surveillance de quartier. Il leur a dit que Lepage vendait de la drogue et des cigarettes. Un mois plus tard, Ti-Wézo se faisait coffrer.

Les drôles d'oiseaux qui profitaient de la sagesse et des largesses de Ti-Wézo se trouvèrent un tant soit peu démunis suite à l'incarcération de leur rayon de soleil.

Ti-Wézo les calmait, l'air de rien.

Sans Ti-Wézo, ils multiplièrent leurs vilaines habitudes, dont celles d'entrer n'importe où par infraction pour subtiliser des biens.

Dumoulin s'est fait voler sa collection de films de répertoire ainsi que son rasoir électrique.

Ça l'a mis hors de lui, vous vous en doutez bien.

Et il s'est juré d'en finir avec la racaille, d'une manière ou d'une autre, en se faisant toujours plus dur et plus intransigeant envers tout manquement à l'ordre et à la raison résonnante.

Ti-Wézo fait son temps en prison.

Les gardiens et les détenus aiment bien Ti-Wézo. Tout le monde le trouve drôle et agréable à vivre, même les types les plus endurcis.

Et vous savez pourquoi? Tout simplement parce que Ti-Wézo est un homme bon.

samedi 16 juillet 2016

Jarnigoine

Mon père sacrait comme tout bon ou tout mauvais Québécois. Comme je souhaitais devenir rapidement adulte, je me suis exercé de bonne heure au sacre. Au grand dam de mon père qui ne tolérait pas qu'un de ses enfants sacre.

-Arrête de sacrer tabarnak! qu'il me disait.

Je trouvais ça paradoxal. Aussitôt après avoir quitté la maison, j'enlignais des chapelets de sacres avec mes amis pour leur montrer que je maîtrisais bien les incantations.

-Hostie d'calice de tabarnak de viârge de christ de saint-ciboire de sacrement d'étole de saint-chrême!

Pas besoin de vous dire que je gagnais tous les concours de sacres organisés entre amis. J'étais capable d'en enligner à l'infini.

À l'école, on me rappelait tous les jours que ce n'était pas beau sacrer. Il était tout aussi laid de dire moé, toé et patente à gosses. Il fallait plutôt dire moi, toi et zut alors.

J'ai donc appris le français standard, puis l'anglais et même le slang.

Par contre, j'ai toujours porté dans mon coeur le joual.

Ce joual tant honni que parlaient mon père, ma mère et tous les miens depuis des générations.

Aujourd'hui encore, je passe facilement du français au joual sans aucune vergogne. Je me félicite de savoir encore sacrer parmi les miens malgré mes études universitaires. Je ne suis pas et ne serai jamais en rupture de ban avec mon milieu et mes origines. Je vais sacrer, couper court aux grands mots et escamoter les syllabes encore longtemps. Parce que j'm'en contre-calice. Parce que moé j'su's né dans l'hostie d'pauvreté sale. Parce que jouer l'jeu des bourgeois c'est perdre son âme à tout coup.

Une certaine chroniqueuse de la bourgeoisie rappelle souvent à son lectorat que le joual, les sacres et les tatouages sont du domaine de la vulgarité. C'est vrai dans la mesure ou vulgus signifie peuple en latin.

Si c'est pour nous faire la leçon, elle peut bien manger un hostie d'char de marde.

***

Dans un tout autre ordre d'idées, on dit de Henri IV disait souvent jarnidieu. Jarnidieu qui voulait dire je renie Dieu... C'est donc dire que Henri IV sacrait.

Le moine Coton, son confesseur, lui reprochait souvent d'employer cette expression.

-Votre majesté ferait mieux d'employer une autre expression que ja r'nie Dieu...

Ce qui fait qu'Henri IV s'est mis à dire jarnicoton au lieu de jarnidieu.

Jarnicoton: je renie Coton...

***

Sacrer, ce n'est rien.

Les Français se traitent de fils de pute, d'enculés, de tout ce que vous voudrez.

Dire à un Québécois qu'il est un fils de pute, un enculé ou ce que vous voudrez ne suscitera tout au plus qu'une curieuse indifférence.

-Hum? se questionnera-t-il. Pourquoi qu'tu parles la bouche en trou d'cul d'poule?

Par contre, si vous lui dites qu'il est un gros hostie d'tabarnak, un calice de sale, un sacrament d'épais, il est possible qu'il se fâche.

Comme quoi le sacre a quelque chose de magique qui ne repose en rien sur sa signification.

C'est phonétique. C'est viscéral. C'est ça, sacrer. Ça pogne aux tripes.

***

Dernier truc, le roi Louis XIV alias le roi Soleil disait "le Roé c'est moé".

Il parlait le joual voyez-vous.

Moé pis toé est en quelque sorte la langue de l'aristocratie.

Une langue que l'on tient à renier tout autant que Dieu ou Coton.

Jarnidieu... Jarnicoton...

L'essentiel, somme toute, c'est d'avoir de la jarnigoine.


La réponse au terrorisme

Pour le valet saoudien qui nous tient lieu de Premier ministre du Québec, la réponse au terrorisme c'est l'ouverture. Selon moi, c'est sortir de la logique inhérente à l'exploitation de l'homme par l'homme. C'est la coopération internationale entre les opprimés contre leurs oppresseurs. C'est l'application des droits de l'homme de l'Arabie Saoudite jusqu'en Palestine en passant par le Mexique et tous les pays de cul contrôlés par la mafia, incluant le nôtre. C'est l'éducation gratuite du primaire jusqu'à l'université. C'est l'accès gratuit aux soins de santé. C'est le revenu minimum garanti pour tous où que l'on se trouve sur le globe.

La réponse au terrorisme c'est aussi de déjouer le terrorisme d'État, les complots menés par les corporations capitalistes pour instaurer la dictature de l'argent partout sur la planète. La réponse à toutes les idéologies haineuses instrumentalisées par des puissances occultes c'est la justice sociale, la liberté, la solidarité et surtout la vérité.

vendredi 15 juillet 2016

Je ne crois plus en la version officielle...

Image tirée du film The Wizard of Oz
Non, je ne ferai pas comme ces scribes qui ne font qu'illustrer ce que leur dictent les pharaons. Je ne soutiendrai pas les propos des bâtisseurs de pyramides. J'adopterai plutôt le point de vue de ceux qui ne savent que pousser des pierres sous les coups de fouet.

Non, je ne goberai pas tout ce que me disent les médias officiels et les valets des maîtres d'un monde devenu laid et chaotique.

Il y a dix ans de cela, j'aurais probablement été plus critique envers les théories dites conspirationnistes. Je ne dirai pas que je les soutiens à cent pourcent. Néanmoins, le doute s'est installé dans ma tête. Croire qu'il n'y a pas de conspiration me semble désormais un summum de naïveté. Qui croit encore que nous sommes gouvernés par des anges? Pas moi en tout cas...

Les manifestations du Printemps Érable, en 2012, auront contribué à faire voler en éclats bien des mythes auxquels je m'accrochais encore quant à la conduite des affaires de l'État. J'ai digéré des renseignements qui provenaient de toutes parts sur les médias sociaux. Et, croyez-moi, ce n'était pas nécessairement que des conneries. J'ai vérifié à la source. J'ai pesé le pour et le contre. Et j'en suis venu à cette conclusion que nous sommes manipulés comme une masse de crétins que l'on dépouille sans vergogne dans les officines du pouvoir.

Les organisations criminelles ont leurs entrées partout, dans les banques aussi bien que dans les parlements.

On paie parfois dix fois le prix réel des contrats publics pour qu'elles puissent profiter de nous. Et ça, évidemment, ce n'est que la pointe de l'iceberg.

Elles exercent des pressions sur les États pour que les peuples soient toujours plus dociles afin de s'emparer de toujours plus d'argent et plus de ressources naturelles.

On prétend faire la chasse aux dictatures. On prétend mettre fin aux tyrannies. Pourtant, nous sommes alliés avec des dictatures qui font très bien l'affaire. On entretient la tyrannie ici et là. Il y a les bons méchants et les mauvais méchants.

On fait tomber les filets de protection sociale entretenus par des États trop éloignés du système bancaire international. Que ce soit des authentiques dictatures ou bien des démocraties, on s'en fout un peu. On veut contrôler le monde et le plonger dans la misère universelle, l'austérité, le "talon de fer qui écrase un visage humain jusqu'à la fin des temps" comme aurait dit Jack London.

Si la mafia peut tuer des êtres humains sans sourciller, parce qu'ils contrecarrent leurs plans, il m'est difficile de croire que l'État agit toujours en toute légitimité et surtout en toute transparence. D'autant plus que la corruption semble le moteur de l'activité politique.

La Gendarmerie Royale du Canada déposait des bombes dans les boîtes postales pour faire accroire que le Front de Libération du Québec était toujours actif. C'est su et documenté. Évidemment, on préfère se fermer les yeux et condamner, avec raison, le terrorisme.

Cependant, cela devrait nous amener à réfléchir sur l'instrumentalisation du terrorisme par cet État qui est sensé protéger nos foyers et nos droits.

Si cela s'est passé il y a trente ans, c'est que cela se passe encore aujourd'hui où que l'on soit sur le globe.

Nous sommes les tristes spectateurs d'actes cyniques et nihilistes commandités par des organisations occultes qui pourraient très bien avoir des liens avec cet État qui est sensé nous défendre.

Les corporations capitalistes financent le remède et la maladie. Ils se paient des groupes de presse et des stations de télévision pour nous faire accroire à leur version trafiquée de la réalité. Comme le disait l'écrivain Éric McComber, ils sont comme ces mafieux qui paient leur pitance au boxeur du coin droit et au boxeur du coin gauche. Ils paient aussi l'arbitre et sont mêmes propriétaires du stationnement. Les spectateurs peuvent bien hurler pour la victoire de tel ou tel boxeur, c'est toujours le promoteur qui va gagner.

Je suis peiné, une fois de plus, pour l'attentat de Nice qui est survenu hier au cours duquel plus de soixante-dix personnes ont trouvé la mort. Est-ce le fait d'un islamiste, d'un déséquilibré ou bien un scénario orchestré par quelques malfrats qui pratiquent la stratégie dite du faux drapeau? Je n'en sais rien. Je ne suis pas convaincu de la véracité de tous les renseignements que je reçois des médias qui sont sensés m'informer ou bien me formater.

Ce que je sais, c'est que nous les humains baignons tous dans la même soupe.

Nous sommes prisonniers de ces pharaons qui tiennent à ce qu'on leur élève des pyramides.

Ils ne veulent pas notre bien. Ils veulent que l'on s'échine pour eux. Ils veulent notre peau.

Voilà pourquoi je me trouve sans voix ce matin.

Je ne sais plus qui ou quoi croire.

Je sais seulement que le monde est une fumisterie. J'ai la conviction que nous sommes gouvernés par des hommes petits et mesquins qui se cachent derrière un écran de fumée, comme le Magicien d'Oz, pour entretenir l'illusion de leur grandeur.

On leur laisse décerner les honneurs, les diplômes et tout le reste mais ils ne peuvent rien pour ceux qui souhaitent retrouver vraiment leur chemin. Ils l'ont perdu parce qu'ils n'en ont rien à cirer de l'histoire, de la religion et des théories économiques sur l'art d'agenouiller les peuples. La voie du salut pour les salauds ne peut être que la soumission absolue à l'autorité.

Nous sommes tous dans le même bateau, tous dans la même galère.

Nous pouvons continuer à ramer et nous contenter de quelques rayons de soleil qui filtrent entre les planches.

Comme nous pouvons aussi nous débarrasser du Magicien d'Oz, du scribe, du prêtre, du député et du pharaon.

Ça dépend de nous.