dimanche 3 février 2013

Le Nouvelliste, Le Journal de Montréal, Line Beauchamp & Denise Bombardier

Je suis allé déjeuner au même restaurant que d'habitude hier matin. Je ne vous dirai pas où c'est. Autrement vous serez bientôt des milliers à vous y rendre. Et il me sera difficile d'y goûter cette quiétude qui prend pour moi des airs de rituel.

Contrairement à l'habitude, il n'y avait plus aucun journal de disponible à l'endroit où ils sont généralement consignés pour les clients du resto.

La serveuse a dû se rendre compte que je cherchais quelque torchon puisqu'elle m'en a passé deux, Le Journal de Montréal ainsi que Le Nouvelliste.

Je l'ai remercié, évidemment, puisque je suis poli.

Puis j'ai commencé par Le Nouvelliste, une petite feuille locale qui nous rappelle que la majorité des gens de ma région sont illettrés. C'est à peine s'ils comprennent le sens général d'un paragraphe. Alors pourquoi Le Nouvelliste devrait-il se forcer? Même ceux et celles qui travaillent pour cette feuille de choufleur écrivent sur un ton toujours froid, obligé et sans style. C'est à peine de la copie pour parlementaires. Cela permet aux commerçants locaux d'annoncer leurs rabais sur le boeuf haché et de vanter le petit maire de la ville. Il est partout, ce petit maire. Et cela fait petite ville qu'une feuille poche comme Le Nouvelliste... Même les offres d'emplois font dur. C'est comme si tout le monde sacrait son camp de la région. Et plus le monde s'en va, et plus on voit la face du petit maire dans ce torchon, lui et tous ses projets de BS de luxe. L'avidité a tout dénaturé dans la région, même Le Nouvelliste. S'il n'y avait pas Guy Godin qui écrit parfois dans le courrier des lecteurs pour dénoncer notre petit maire des bécosses je ne l'ouvrirais même pas.

J'ai rapidement sauté au Journal de Montréal. Comme la majorité des Québécois peinent dans l'exercice de la compréhension de texte, ce torchon provincial accorde bien plus de place aux photographies et, visuellement parlant, c'est plus agréable que ce que nous offre Le Nouvelliste. 

Le Journal de Montréal est bourré de photos d'incendies, de chars qui sont rentrés dans un poteau et de politiciens qui ont l'air de se rentrer des concombres dans le cul. Bien que cela soit de la vile copie pour emballer du poisson, c'est plus humoristique. Les vrais génies du Journal de Montréal sont ses infographistes, parce que pour les textes on ne peut pas dire que ça lève très haut, bien qu'il y a eu Jean Barbe jadis. La plupart du temps ce sont des têtards de droite qui s'y expriment. La gauche y est représentée par quelques chroniqueurs folkloriques, une poignée de lurons pour que le Journal ait l'air un peu objectif et la gauche moins subversive.

Hier matin, la page frontispice était consacrée à une entrevue de Denise Bombardier avec Line Beauchamp, ex-ministre libérale de l'éducation pendant le Printemps Érable.

Denise Bombardier est une comédienne qui vit nettement au-dessus de ses moyens intellectuels. Je sais bien que je reprends l'expression créée par Dany Laferrière pour qualifier l'oeuvre de Richard Martineau, lui aussi chroniqueur au Journal. Mais ça lui colle tout aussi bien. N'en déplaise à Laferrière... Qui de mieux que Denise Bombardier pour comprendre celle qui s'est sentie trahie par son grand Tom?

Line Beauchamp figurait hier en première page, étendue sur un sofa couleur banane, en bottes d'hiver. J'ai été naïve... C'est le titre qui a été accordé à ce publireportage tout juste bon pour se torcher le nez parce qu'on ne voudrait pas faire du tort à son cul.

La pauvrette a cautionné le matraquage de son propre peuple l'an dernier et elle vient se présenter en petite victime sous la plume sèche de Madame Pète-Sec. Cela me rappelle tout de suite un passage des Frères Karamazov quand le poète laisse entendre qu'il ne faut pas regarder le naufrage au loin mais lui qui souffre, les deux pieds au sec sur la rive, d'assister à la mort des naufragés. C'est du narcissisme à l'état pur, un état que l'on trouve fréquemment chez les marquises mais rarement chez les phoques.

Ça tape sur la gueule des citoyens, ça veut déposséder le peuple de ses droits et de ses ressources naturelles, et puis ça vient pleurnicher en bottes d'hiver sur un sofa jaune banane. Madame Ducon-Lajoie trouve qu'on ne respecte plus les femmes en situation d'autorité. Puis on voit Liline étendue sur son sofa, avec ses p'tits pié-pieds, en train de faire un peu de cocooning. Elle parle de son ex-homme, de sa vie, tralalère, pour faire oublier un ou deux yeux perdus, des dents cassés, des arrestations arbitraires... qui nous ont valu des critiques de l'ONU sacrament!!!

J'ai refermé le Journal assez vite. Il y a des limites à montrer son caca et à nous faire accroire qu'il goûte bon.

J'ai terminé mon p'tit-dèj' sans journaux.

La prochaine fois, j'emmènerai un livre. Le dictionnaire des idées reçues de Gustave Flaubert. Ou bien L'exégèse des lieux communs de Léon Bloy. N'importe quoi permettant d'entretenir une certaine indignation face à ce brouet excrémentiel que l'on tient à faire passer pour des analyses fines de l'actualité. Ce ne sont que des ectoplasmes de petits-bourgeois qui n'ont rien à dire et qui nous les vomissent tout de même.




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