mardi 2 octobre 2012

On veut travailler!

Cela se passait il y a une quinzaine d'années. Probablement en octobre puisque je portais un manteau de pluie. Je déambulais sur la rue Laviolette à Trois-Rivières. C'était un début de semaine. Peut-être un lundi ou un mardi matin. Oui, cela se passait le matin et, bien sûr, il pleuvait. Et j'avais un peu froid, brrrr...

Ce n'était pas une grosse pluie. Pas du genre de pluie qui fait ressortir tout le félin par trop douillet qui est en vous. C'était une pluie fine, oui. Du genre de pluie qui ne me donnait pas envie de porter un parapluie. Même s'il pleuvait des cordes, je n'en voudrais pas, de parapluie... Je suis trop large d'épaules.  Cela me prendrait un parasol. Et encore.

Évidemment, je n'avais pas l'envie de parler de moi ce matin-là. Je ne savais pas ouate de phoque ce que je faisais. Peut-être que je m'en allais quelque part, oui, sans doute.

J'étais à la hauteur de la cordonnerie et il mouillassait.

Et comme je marchais en direction de la rue St-Maurice, voilà que surgit une foule de trois cents personnes. Ils prenaient toute la rue, portaient des pancartes et scandaient ce slogan:

-On veut travailler! On veut travailler!

C'était les employés de l'ancienne shop Wabasso, devenue Domtex et je ne sais plus trop quelle marque de commerce à la fermeture.

Quoi qu'il en soit les actionnaires de leur shop nous avaient floués, nous, vous et eux-mêmes. Ils avaient mis la clé dans la porte et étaient partis avec les subventions publiques. Sans oublier d'ajouter dans leur cagnotte l'investissement personnel des employés, quelques milliers de dollars chacun et chacune, énième mesure pour sauver la shop et leur job...

-On veut travailler! On veut travailler!

Il pleuvait ce matin-là. Oui.

Je me souviens d'avoir croisé Donald, un ami d'enfance. C'est lui qui m'avait expliqué les crosses de sa crisse de shop sale et sans-coeur.

Il y avait quelques enfants parmi les manifestants. Dont une jeune fille rousse qui avait l'air plus en tabarnak que les autres. Et un petit roux aussi, probablement son frère, qui faisait valser sa pancarte comme s'il s'agissait d'un sabre.

Peu de sourires de matin-là, oui.

Il n'y avait d'attention que pour ce slogan.

-On veut travailler!

La foule passait parmi les rues désertes.

Aucune auto.

En fait, je pense bien qu'il n'y avait que moi sur le trottoir ce matin-là, sous la pluie, oui.


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