jeudi 28 janvier 2010

Origène Malenfant

Origène Malenfant était un homme plutôt sobre qui vivait dans le fin fond d'un bois, près d'un lac, au nord de St-Sicroche-des-Éboulements. C'était un petit bonhomme avec des nerfs d'acier, une barbe hirsute et des yeux bleus.

Il était tout fin seul dans une vieille cabane de plywood assez bien isolée et recouverte de papier brique pour mieux résister aux intempéries. Il l'avait construite de ses propres mains.

Personne ne venait voir Origène parce qu'à peu près personne ne savait qu'il habitait là. D'ailleurs, on ne pouvait s'y rendre qu'en bateau, l'été, ou en motoneige l'hiver. Et puis Origène était sans famille, sans amis. Comme il n'était membre d'aucune secte personne ne venait lui dire comment vivre. Donc, il entendait tous les bruits de la forêt quand tout un chacun n'y entendait que le silence.

Origène n'avait pas d'électricité ni de télévision ni de radio ni d'ordinateur.

Il se chauffait au bois et s'éclairait à l'huile.

Il mangeait du poisson, de l'orignal, du castor et même du rat musqué.

Il allait une fois par mois en ville pour aller chercher son chèque de pension de vieillesse au bureau de poste de St-Sicroche. Ensuite, il passait au Marché Gervais & Fils pour ramener les produits de base: farine, riz, pâtes alimentaires, sucre, lait en poudre, savon, dentifrice, etc.

Il rembarquait dans son bateau ou bien enfourchait son skidoo pour revenir dans sa hutte de plywood.

De retour au foyer, il reprenait ses activités: chasse, pêche, trappe, cueillette de fruits, noix et légumes sauvages, etc.

On disait qu'il était un Sauvage et, franchement, c'en était un.

Un vrai de vrai. Qui avait assez fréquenté les humains dans son jeune temps pour pouvoir se passer d'eux pour ce qui lui restait à vivre.

Origène avait travaillé pendant cinquante ans au même restaurant, le Resto Chez Ti-Père, à St-Sicroche. Cinquante ans de loyaux services à titre d'homme à tout faire. À sa retraite, il s'était définitivement retiré dans le fin fond des bois. Et il se lavait tous les jours, même s'il vivait seul.

Quand il mourra, il n'y aura que moi pour écrire son épitaphe.

Ouais.

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